Pourquoi faut-il dire « bonjour » plutôt que « bon matin »? Pour plusieurs excellentes raisons. Et Gilles Vigneault nous en a donné quelques-unes à l’émission Tout un matin de la radio publique, à la veille de la fête nationale. On y a diffusé un extrait d’une entrevue avec le le poète sur le sujet. Notre barde national se dit personnellement horrifié, autant par le « bon matin » que par le « bonjour hi ». Selon lui, ces expressions sont des trahisons à l’esprit de la langue française et des signes de démission face aux assauts envahisseurs de l’anglais. Il dit aussi que le bonjour appartient à un bassin de vocables précieux de la langue française dont la fonction est de créer du lien social.
Tout à fait d’accord et permettez-moi d’en rajouter. Il faut je crois insister sur l’importance toute spéciale du mot bonjour dans notre culture. Bien sûr, comme les linguistes se plaisent à nous le répéter, les langues évoluent et c’est l’usage qui décidera. Reste que nous avons le choix de peser nos mots. Aussi, nous devrions réfléchir avant de nous priver de la richesse symbolique associée au mot bonjour en particulier.
Premièrement, adresser un bonjour nous relie à toutes les personnes qui l’ont prononcé depuis quelques siècles. Le remplacer par autre chose marque une rupture dans cette perpétuation, que cela vienne du français ou de toute autre langue. Deuxièmement, le bonjour exprime le souhait d’une journée de temps heureux, tandis que bon matin ne concerne qu’un départ du bon pied. Troisièmement, au Québec, bonjour est devenu un signe d’identité culturelle, la marque d’une disposition des gens d’ici à l’accueil. Il était donc bien fondé d’en faire un slogan de promotion du tourisme dans la Belle province. Certains ont peut-être été refroidis par cette récupération institutionnelle. Qu’à cela ne tienne, le mot n’est pas une invention du ministère du Tourisme. Notre bonjour nous appartient.