Notre-Dame de Paris, chantier humaniste

Malgré tout ce qui sera dit sur la récupération de l’événement Notre-Dame par les politiciens et religieux de tout poil, l’émotion ressentie en Occident lors de l’incendie donne à réfléchir. Beaucoup d’entre nous ont pris conscience de leur lien sentimental avec la cathédrale en la voyant en flammes. Comme je l’écrivais dans un article paru en octobre 2019 : « Il est en un sens déconcertant de constater que l’incendie d’une église puisse provoquer davantage d’alarme que les catastrophes humanitaires par trop fréquentes un peu partout sur la planète. Mais cela confirme l’importance absolument vitale des symboles pour l’existence de nos sociétés. » (« Notre-Dame littéraire », Nuit Blanche, no 156, p. 30-33.)

Je suis d’ailleurs toujours sidéré d’entendre des commentateurs persuadés de dénigrer un fait en le qualifiant de « symbolique ». Le monde symbolique est tout aussi important que le monde matériel. Ces deux aspects de notre réalité sont inextricablement liés et Notre-Dame de Paris en est un bon exemple.

Après plus de cinq ans de travaux de reconstruction, Notre-Dame revient au-devant de l’actualité. Sa nouvelle version est inaugurée aujourd’hui et chacun y va de son interprétation de la mobilisation suscitée par le projet de restauration. Christian Rioux, dans le journal Le Devoir, voit dans l’attachement à la cathédrale une preuve de l’importance persistante du sacré. Le chroniqueur en profite pour inviter les Québécois à reconnaître leur héritage catholique. Reconnaître un héritage, volontiers, mais pas pour retomber dans la bondieuserie.

Les artisans qui ont donné leur vie dans les chantiers des cathédrales, souvent échelonnés sur plus d’un siècle, avaient une foi religieuse qui leur était imposée. Qu’ils en aient eu conscience ou non, ils participaient à une œuvre collective en elle-même génératrice de ferveur. Ils construisaient de la transcendance. Au-delà de la religion, le fruit de leur travail devrait alimenter notre foi en l’humanité.

Commentaires

  1. Je partage entièrement la thèse suivant laquelle « Le monde symbolique est tout aussi important que le monde matériel ».

  2. Les symboles, c’est le monde commun !

    Jacques Lacan : « C’est le symbole qui a fait l’homme » ; l’humain pourra par la suite guider son action en toute liberté (Écrits, 1966).

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